La honte

La honte. La vraie. Connerie de merde et c’est le cas de le dire.

J’dis ça, je dis rien. Bof. Sincèrement j’ose espérer que ça n’arrive pas qu’à moi même si malheureusement je suis probablement la seule qui osera le dire tout haut….

J’ai fait (ou plutôt mon corps à laissé échappé) un gaz silencieux ultra-puantissime à la caisse du Jean-Couteux. Le style de pet que tu fais semblant de ne pas avoir fait mais qui sens tellement fort que la caissière peut pas s’empêcher de rougir à force de retenir son souffle. Le genre de flatulence que tu espère n’être qu’un vent. Le genre de rot anal que tu renonce à contenir de peur de décharger une merde plutôt qu’une bourrasque. M’enfin. Vous voyez l’image… Tu vois l’image, dis?

La honte disais-je.

Tu veux que j’en ajoute? Le genre de pet qui te fait enfin! t’écrouler sur la cuvette. Avec manteau, foulard et sac à main encore sur l’épaule.

Tu en veux plus? Le genre de gaz qui t’étourdit et te donne la nausée si tu l’as fait dans ta voiture. Et qui t’oblige à baisser les vitres, même à -40°C.

Non mais avoue que tu n’as pas encore compris l’ampleur de la puanteur de ce pet là. Sérieusement, imagine la poubelle à couche de ton marmot, trop pleine et multiplie par 1000 disons. Et là, là maintenant, là tu comprends.

La honte!

Mais les nausées s’installent!

Oui les bonnes nouvelles s’enchaînent.

Après l’excitation de l’avoir annoncé à notre famille proche, le quotidien nous rattrape.

Être enceinte ET en processus de rénovation, ce n’est pas évident.

Parce que je veux faire attention à ce petit être tellement petit et fragile mais en même temps je veux être capable d’être aussi performante que si je ne portais pas ce même être. Paradoxe difficile à gérer pour une fille comme moi, qui se sent bien et heureuse que lorsqu’elle arrive à en faire plus que les autres. Mieux que les autres. Parce que je suis du genre à être capable de me créer de l’angoisse de performance dans à peu près toute les sphères de ma vie.

Alors voilà que je dois apprendre. À vivre autrement. Pour toi. Pour cet enfant. Pour mon conjoint qui s’inquiète de me voir aller. Parce qu’il me connait et qu’il sait bien que lorsque j’en fais moins, je me sens « moins ». Alors que je n’ai qu’à regarder dans ses yeux pour savoir que je suis tout. Toute sauf moins.

Et alors il trouve les mots. Les bons. Ceux qui me font me sentir moins coupable d’être fatiguée. D’avoir mal au coeur. De me sentir laide et amorphe alors que je devrais n’être que joie. Alors quand je me sens inefficace, je reçois un « tu sais, je ne suis pas capable d’être enceinte moi ». Et ça m’aide un peu. Parce que je me dis que si je n’écoute pas mon corps, il va trouver un moyen de me le rappeler et qu’un corps qui parle, c’est souvent signe des temps.

Alors j’apprends. Et finalement, ce n’est pas si mal. De se valoriser pour ce que l’on est. Pas seulement pour ce que l’on fait ou accompli. Les neufs mois sont peut-être fait pour ça au fond. Décortiquer qui nous sommes afin d’être prêt à voir un enfant naitre et se reposer sur nos épaules. Nos épaules maintenant dénuées d’orgueil mal placé ou de colère mal gérée.

Au moment ou j’écris ces lignes, il me reste deux semaines avant d’enfin pouvoir te prendre dans mes bras. Quinze jours d’attentes.

Quinze jours!